Bassin versant de la Loire aval
De la confluence de la Maine à son embouchure, la Loire parcourt 140 km, passant de son dernier bief fluvial à sa section maritime.
Le chenal constitue essentiellement une zone de transit pour les poissons migrateurs qui l’empruntent lors de leur migration de montaison et de dévalaison. Ils doivent donc s’adapter aux paramètres environnementaux très variables de l’estuaire (salinité, oxygène dissous, turbidité etc.).
Ce secteur est marqué par la présence de nombreuses annexes hydrauliques et des marais estuariens dont les fonctionnalités et l’intérêt écologique sont majeurs notamment pour l’anguille.
Les marais estuariens en aval de Nantes
Les marais estuariens de la Loire s’étendent sur une superficie de 10 130 ha. Ils sont constitués d’un réseau hiérarchisé de canaux, douves et rigoles qui représentent un linéaire cumulé de plus de 1 700 km, régulé par plus de 250 ouvrages hydrauliques.
Ces zones de marais rassemblent également des secteurs d’habitats temporaires intéressants pour certaines autres espèces amphihalines (flet, mulet) ou marines (plie, sole, gobie, bar). La présence d’espèces marines dans ces marais renforcent d’autant plus l’intérêt d’une coordination entre le Plagepomi, le Sdage et le Pamm de la sous-région marine du Golfe de Gascogne.
Les aménagements portuaires, les modifications du lit des cours d’eau et la multiplication des ouvrages hydrauliques ont bouleversé les caractéristiques hydrauliques et le fonctionnement des marais, particulièrement dans l’estuaire de la Loire.
Les annexes hydrauliques de la Loire entre Nantes et Montsoreau
Les annexes hydrauliques de la Loire (plus de 120 entre Nantes et Montsoreau) sont des dépendances du fleuve qui ont un rôle temporaire vis-à-vis des écoulements superficiels. Leur agencement, généralement parallèle au fleuve, est dû à la topographie particulière du remplissage sédimentaire, les abords du lit mineur – le bourrelet de rive – plus élevés que les pieds de coteaux s’opposant bien souvent à la fusion directe des eaux.
Elles ne participent aux écoulements qu’au-delà d’une certaine hauteur d’eau en fonction de l’altitude relative de leur(s) connexion(s) au fleuve. Trois types d’annexes sont identifiés :
- Les bras secondaires sont connectés en amont et en aval au bras principal dont ils sont séparés par des îles stabilisées et végétalisées. A l’étiage, ils présentent de vastes plages de sable alors qu’en périodes de hautes eaux, ils peuvent devenir bras principaux. Nombre d’entre eux sont barrés par des digues ou des chevrettes en enrochements renvoyant, en-deçà d’un certain débit, les eaux dans les bras navigables. Les bras secondaires remplissent une fonction d’écoulement des crues, variables selon leur niveau d’ensablement et de connexion (fonction plus faible pour les bras fermés). Leurs fonctions biologiques ne sont pas négligeables pour autant : sites d’accueil pour le développement des alevins à la sortie des bras morts, productivité primaire supérieure au chenal principal et installation d’invertébrés (trichoptères Hydropsychidae, mollusques du genre Unio…) grâce au ralentissement du courant, reproduction en fonction des variations hydrologiques d’espèces rhéophiles (chevaine, ombre, barbeau, vandoise) et limnophiles (gardons, rotengle), refuge en cas de pollutions accidentelles.
- Les bras morts (ou boires) sont des dépressions de la plaine alluviale, anciens bras abandonnés. Elles sont caractérisées par une végétation permanente et une connexion unique, le plus souvent à l’aval. Quand leur fond est perméable (sable, gravier), le niveau de l’eau y suit celui de la nappe alluviale par capillarité ; par contre quand elles sont étanches, elles se remplissent des eaux de ruissellement des coteaux ou des affluents, ou par débordement direct. Les bras morts jouent un rôle important au niveau de la reproduction des poissons phytophiles (inféodés à la végétation herbacée) comme la carpe, le rotengle et le brochet. Elles représentent également des zones d’ habitats et de grossissement pour l’anguille adulte.
- Les basses vallées d’affluents sont des zones inondables, submergées par les eaux de l’affluent ou lors du refoulement des eaux de la Loire. Le bourrelet de rive contraint l’affluent à emprunter une ou plusieurs boires avant de se jeter dans le fleuve. Dans la majorité des cas, des vannages placés à leur débouché dans la vallée y maintiennent un certain niveau d’eau pendant l’étiage. Elles constituent entre autres fonctions, en complémentarité avec les bras morts et les bras secondaires, des zones de frayères productives, en particulier pour le brochet, grâce à la couverture végétale
L’aménagement du fleuve pour la navigation (obturation des bras secondaires par des digues, resserrement du bras navigable entre des épis) et les extractions de sable dans le lit mineur ont provoqué l’incision du thalweg de navigation dans les sables du lit induisant l’affaissement des lignes d’eau de faibles débits et, de manière concomitante, l’assèchement estival des annexes. L’ensemble du fonctionnement écologique de la vallée, en termes d’échanges de matière, d’énergie et de population, fut ainsi affecté.
Or, les dépendances et solidarités latérales sont vitales pour de nombreuses espèces, notamment de poissons, dont le brochet et l’anguille.
Des Ponts-de-Cé à Nantes, la cartographie des 81 annexes hydrauliques réalisée par le GIP Loire Estuaire en 2006 constitue un inventaire exhaustif de ces milieux répartis comme suit : 36 bras secondaires, 35 bras morts, 6 annexes artificielles et 4 marais mouillés. La superficie totale est d’environ 2 600 hectares.
Deux types de biefs sont différenciés en fonction des conditions hydrauliques : les 35 km du bief fluviomaritime, dont la limite amont se situe à Anetz et les 45 km du bief fluvial, d’Anetz aux Ponts-de-Cé. Le nombre de bras morts et de bras secondaires se répartit équitablement dans les 2 biefs, mais pas la superficie, qui reste largement supérieure dans le bief fluvial.
Bassin versant de la Sèvre niortaise
Le bassin versant de la Sèvre niortaise était historiquement peuplé d’anguilles, d’aloses, de lamproies et de truites de mer. Il accueille également des populations de flet commun et représente un intérêt aujourd’hui important pour toutes les populations de poissons amphihalins. En particulier, c’est, avec les côtiers vendéens, l’un des quatre bassins versants prioritaires pour la restauration des populations d’anguilles d’après le Sdage 2010-2015.
Ce bassin versant se distingue par la forte densité de son réseau hydrographique, réparti entre des fleuves et rivières alimentant le marais poitevin, et un réseau de canaux dans le marais. La gestion des niveaux d’eau dans le marais a conduit à l’édification des nombreux ouvrages de régulation depuis le Xe siècle. Ce système hydraulique complexe se traduit par une succession d’ouvrages à franchir pour les poissons migrateurs amphihalins. Un premier enjeu dans ce bassin versant porte sur la restauration de la continuité écologique.
La gestion quantitative représente l’enjeu majeur de ce territoire. En effet, les assèchements successifs de zones de marais par le passé, et les assecs temporaires pouvant survenir en période estivale, notamment dans certains cours d’eau, ont conduit à une forte réduction des surfaces d’habitats productifs pour les poissons migrateurs amphihalins. Aussi, les opérations de curage des cours d’eau ayant pu être menées ont engendré un déséquilibre sédimentaire qui a conduit à de nouvelles pertes d’habitats essentiels pour les espèces amphihalines. La gestion des niveaux d’eau revêt un intérêt biologique majeur, afin de restaurer des habitats productifs et de préserver la submersion de zones de marais favorables à la reproduction et au développement de certaines espèces amphihalines.
Bassins versants des côtiers vendéens
Les bassins versants des côtiers vendéens sont notamment fréquentés par l’anguille, mais peuvent aussi accueillir de petites populations d’aloses, de lamproies et de truite de mer. Ces bassins versants restent des bassins favorables à l’accueil, notamment, des populations d’anguilles et constituent, avec la Sèvre niortaise, un des quatre bassins versants prioritaires pour la restauration des populations d’anguille d’après le Sdage 2010-2015.
La présence d’ouvrages limite les capacités de progression des espèces amphihalines vers les zones amont des bassins versants, tandis que des surfaces d’habitats productifs peuvent être perdues temporairement par des épisodes d’assecs en période estivale essentiellement.
Les enjeux principaux dans ces bassins versants portent, d’une part, sur la gestion quantitative équilibrée de la ressource en eau, afin de maintenir une hydrologie qui permette le maintien d’habitats productifs, et d’autre part, sur la restauration de la continuité écologique, notamment amont-aval.
Bassin versant de la Vienne
Le bassin de la Vienne était historiquement peuplé par l’anguille, les aloses, les lamproies et le saumon atlantique.
Le territoire est marqué par une agriculture extensive de polyculture élevage sur l’ensemble des têtes de bassin versant et rassemble des zones de grandes cultures dans les plaines de l’aval.
Au niveau hydraulique, l’édification progressive d’ouvrages transversaux a conduit à une raréfaction es espèces de poissons amphihalines, qui recolonisent le bassin depuis l’effacement du seuil de Maisons-Rouges en 1998 à l’exutoire du bassin de la Vienne. Si la densité des ouvrages reste importante sur la Vienne, la Creuse et la Gartempe, les opérations successives d’aménagement en faveur du rétablissement de la continuité écologique ont permis, notamment sur la Vienne, une progression du front de colonisation par les poissons amphihalins sur une distance de 120 km depuis 15 ans. Les ouvrages des complexes de l’Isle Jourdain, sur la Vienne, et d’Éguzon, sur la Creuse, constituent actuellement des verrous infranchissables.
Le bassin de la Vienne est également marqué par la présence de plusieurs milliers de plans d’eau, susceptibles d’impacter les régimes hydrologique et thermique des cours d’eau auxquels ils peuvent être connectés ou dans les bassins versants desquels ils interceptent les écoulements gravitaires.
Actuellement, le bassin de la Vienne accueille la population de lamproies marines la plus nombreuse à l’échelle européenne et la population d’aloses la plus nombreuse du bassin de la Loire. Des anguilles sont également présentes dans ce bassin, l’un des quatre du bassin Loire-Bretagne étant identifié comme bassin prioritaire pour la restauration de la population d’anguilles par le Sdage 2010-2015.
La Gartempe a fait l’objet depuis les années 1980 d’un programme de restauration du saumon atlantique. Actuellement, des saumons fréquentent le cours aval de la Vienne, de la Creuse et de la Gartempe. Aucune opération de soutien d’effectif n’étant menée dans la Vienne et dans la Creuse, ces observations témoignent de l’existence d’une recolonisation naturelle de ce sous bassin versant.
Toutefois, les données biologiques disponibles ne permettent pas d’attester l’existence d’une population sauvage autonome de saumons dans ce bassin, des frayères naturelles attestent cependant de la reproduction et les captures d’alevins du succès de leur développement.
Bassin versant de la Maine
Le bassin de la Maine accueillait historiquement des populations d’anguilles, d’aloses, de lamproies et de truites de mer. Ce bassin versant est aujourd’hui un des quatre bassins prioritaires pour la restauration des populations d’anguilles dans le Sdage 2010-2015, et présente également un intérêt marqué pour les populations d’aloses et de lamproies.
La raréfaction de la présence des migrateurs amphihalins dans ce bassin versant peut provenir d’un effet cumulé de différents facteurs ayant engendré une altération des habitats et de la morphologie des cours d’eau.
La densité des ouvrages est importante sur les principaux cours d’eau de ce bassin versant. Des opérations de gestion engagées ces dernières années sur la Mayenne ont permis de réduire les difficultés de migration sur ce cours d’eau, notamment des anguilles à la dévalaison. Par ailleurs, le cloisonnement des milieux est renforcé par une densité importante de plans d’eau dans ce bassin, qui interceptent une partie des écoulements naturels. Un autre enjeu sur ce territoire porte sur la conciliation des prélèvements pouvant être marqués, notamment en période d’étiage, avec les besoins minimaux pour conserver les fonctionnalités des milieux aquatiques.
Bassin versant de la Loire moyenne
Du bec d’Allier au bec de Vienne, la Loire reçoit deux affluents principaux : le Cher et l’Indre. Le sous bassin versant du Cher fera l’objet du paragraphe 2.2.4.
La Loire moyenne constitue un secteur de passage pour l’ensemble des espèces migratrices amphihalines. L’effacement du seuil mobile de Blois en 2005 dans le cadre du plan Loire et l’équipement des seuils des quatre centrales nucléaires de Belleville sur Loire, Dampierre en Burly, Saint Laurent-Nouan et Avoine ont rétablit la transparence migratoire.
Des habitats favorables à la reproduction des aloses sont recensés sur la partie amont de ce secteur, là où la Loire délimite les départements du Cher et de la Nièvre.
L’Indre est marquée par un nombre important d’obstacles transversaux qui explique la réduction de la présence des poissons amphihalins sur ce cours d’eau. Seule l’anguille reste aujourd’hui présente de manière non anecdotique dans ce cours d’eau.
Bassin versant du Cher
Le bassin versant du Cher était historiquement peuplé par l’anguille, les aloses, les lamproies, le saumon et la truite de mer.
L’anthropisation de son cours, avec les aménagements pour la navigation en aval de Saint-Aignan-sur-Cher (Cher dit canalisé), la création de seuils pour l’exploitation de la force motrice de l’eau et les extractions de granulats, notamment entre Montluçon et Vierzon, ont engendré une altération de la continuité écologique et de la morphologie pouvant expliquer la raréfaction de la présence des amphihalins.
Ces évolutions expliquent en partie le fait que ne soient constaté à l’heure actuelle la présence d’aloses et de lamproies que sur le Cher en aval de l’agglomération tourangelle. L’anguille est le poisson amphihalin le plus largement réparti sur le bassin du Cher actuellement (présente dans les bassins du Cher, de l’Yèvre, de la Sauldre, du Fouzon).
Le Cher en amont du barrage du Prat, infranchissable, est inaccessible aux poissons migrateurs amphihalins.
Bassin versant de la Loire bourguignonne
Ce bassin versant est constitué par la Loire, du pied du barrage de Villerest jusqu’au bec d’Allier. De l’amont vers l’aval, trois affluents principaux confluent avec la Loire dans ce secteur géographique : l’Arroux, la Besbre et l’Aron.
Historiquement le saumon atlantique, la grande alose, la lamproie marine et l’anguille étaient présents dans ces cours d’eau.
La réduction des habitats de reproduction ou de grossissement des poissons amphihalins est essentiellement due sur ce territoire, notamment sur les affluents de la Loire, aux obstacles qui ont progressivement entravé la libre circulation piscicole et aux activités d’extraction de granulats qui ont engendré des déséquilibres sédimentaires provoquant une altération d’une partie des habitats favorables.
A l’heure actuelle, le saumon, la lamproie marine et la grande alose sont rencontrés dans la Loire et dans les parties aval des affluents précédemment cités. L’anguille est le poisson amphihalin qui présente la plus large répartition géographique dans ce sous-bassin versant.
Bassin versant de l’Allier
Le bassin de l’Allier concentre l’essentiel des habitats favorables actuellement accessibles pour le saumon atlantique à l’échelle du bassin de la Loire. C’est également le seul bassin où survit une population résiduelle de saumons sauvages.
Des populations d’anguilles, de lamproies et d’aloses sont également présentent sur le bassin de l’Allier.
La construction de seuils et barrages destinés à la production d’hydroélectricité, ou la création de retenues d’eau pour l’irrigation, a progressivement restreint l’aire de répartition des poissons migrateurs amphihalins sur ce bassin, notamment du saumon, en limitant l’accès aux habitats situés sur les partie amont des cours d’eau de ce bassin versant.
L’effacement du barrage de Saint Etienne du Vigan en 1998 et l’équipement du barrage de Poutès en dispositifs de franchissement à la montaison en 1986 et à la dévalaison en 1998 ont permis de faciliter l’accès du saumon aux secteurs de reproduction situés sur le haut-Allier et ses affluents. Toutefois des difficultés migratoires persistent sur l’Allier et se manifestent par l’accumulation de retards dans les migrations. Une nouveau dispositif de montaison et de dévalaison devrait permettre une meilleur circulation des poissons et des sédiments dans les années à venir.